Publié en mai 2021 aux éditions Seuil, le livre « Goldman » de Ivan Jablonka raconte la carrière musicale du chanteur avec une telle précision qu’il en devient passionnant, nonobstant l’intérêt que l’on porte au sujet principal.
Nous ne sommes pas obligé d’être un fan du sujet d’une biographie pour en apprécier la lecture. C’est la première réflexion qui vient à l’esprit après la lecture de “Goldman” (Seuil, 2023) de Ivan Jablonka.
La vie par procuration
Il est vrai que le sujet est paradoxal. Même si la musique de Jean-Jacques Goldman nous laisse au mieux indifférent, on ne peut nier que l’artiste reste présent dans nos esprits. Durant sa période de gloire qui va du début des années 1980 au milieu des années 1990, chacun des tubes du chanteur ou de ses interprètes passait en boucle à la radio et à la TV, au point que les paroles se sont inscrites au fer rouge dans notre esprit.
L’objectif de l’auteur Ivan Jablonka, fan du chanteur, est de nous expliquer comment un type “normal” a pu devenir un tel phénomène de la chanson française. Rien ne prédestinait Jean-Jacques Goldman à un tel destin. Passionné de musique dans son adolescence, il n’en faisait toutefois pas une priorité, préférant suivre les écoles de commerces et reprendre le magasin de sport de ses parents.
Toutefois, Goldman sévissait dans un groupe à la renommée confidentielle, Tai Phong, qui tenait de devenir une sorte de Genesis ou de Pink Floyd à la française. Parallèlement, le gérant du Sport 2000 de Montrouge écrivait des chansons qu’il adressait à de grands interprètes, que ceux-ci refusèrent poliment.
Le nom de Goldman n’était alors célèbre que par son demi-frère, Pierre Goldman, militant d’extrême-gauche qui a peu à peu sombré dans la délinquance. Bien que n’approuvant pas ses exactions, le futur chanteur reste proche de son demi-frère, assassiné en 1979.
Il suffira d’un signe
C’est à l’âge de trente ans, celui où beaucoup de carrières musicales ont été abandonnées, que le destin de Goldman change. Son premier morceau “Il suffira d’un signe” publié en 1981 fait un carton. C’est le premier tube d’une longue série.
Goldman s’inscrit ainsi dans le décor des années 1980. Celui des années Mitterrand et des premières radios libres, de Jack Lang et de la fête de la Musique, puis de Canal Plus et de son Top 50 qui ringardise les grand-messes du samedi soir de Michel Drucker. On peut s’étonner dès lors qu’un chanteur sans look particulier soit devenu le symbole d’une décennie où le look et le paraitre renforçaient la réussite d’une carrière.
Bien qu’il s’inspire largement du blues et du rock de son adolescence, Jean-Jacques Goldman est boudé par Best et Rock’n’Folk qui font autorité dans la presse rock de l’époque. Goldman restera un chanteur de variété, un statut que, succès aidant, il assumera sans mal.
Ivan Jablonka insiste beaucoup, notamment dans les premiers chapitres du livre, sur la judéité du chanteur et de son penchant pour les idées de gauche, alors que le sujet lui-même militait peu. Le plus intéressant reste tout ce qui concerne la carrière musicale du chanteur, ses années de vaches maigres, sa période de succès et sa mise en retrait. L’auteur n’a pas hésiter à publier nombre de tableaux pour agrémenter un texte vraiment passionnant.
- “Goldman” de Ivan Jablonka (éditions du Seuil). 400 pages. 140x225mm. 21,90€